1 Contexte : la biodiversité en question
À l’heure où le concept de « sixième extinction » de masse est largement vulgarisé, la question du déclin de la biodiversité interpelle directement le monde économique et la responsabilité des organisations.
Dans le résumé à l’intention des décideurs de son Rapport sur l’évaluation mondiale de la biodiversité et des services écosystémiques, la plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES[1]), créée en 2012 sur le modèle du GIEC, résume de nombreux travaux de recherche à travers les constats suivants :
– Les trois quarts de l’environnement terrestre et environ 66 % du milieu marin ont été significativement modifiés par l’action humaine. En moyenne, ces tendances ont néanmoins été moins graves voire évitées dans les zones qui appartiennent ou sont gérées par des peuples autochtones et des communautés locales.
– Plus d’un tiers de la surface terrestre du monde et près de 75 % des ressources en eau douce sont maintenant destinées à l’agriculture ou à l’élevage.
– En 2015, 33 % des stocks de poissons marins ont été exploités à des niveaux non durables ; 60 % l’ont été au niveau maximum de pêche durable et seulement 7 % à un niveau inférieur à celui estimé comme étant durable.
– Les zones urbaines ont plus que doublé depuis 1992.
– La dégradation des sols a réduit de 23 % la productivité de l’ensemble de la surface terrestre mondiale. Ainsi, une partie de la production agricole annuelle mondiale doit faire face à la disparition des pollinisateurs, et 100 à 300 millions de personnes sont exposées à un risque accru d’inondations et d’ouragans en raison de la perte de leur habitats côtiers.
– La pollution par les plastiques a été multipliée par 10 depuis 1980.
– Les tendances négatives de la nature continueront jusqu’en 2050 et au-delà, dans tous les scénarios politiques explorés dans le rapport, sauf dans ceux qui proposent un changement transformateur.
Les principaux messages délivrés par ce rapport portent sur quatre points :
- La nature et ses contributions vitales aux populations, qui ensemble constituent la biodiversité et les fonctions et services écosystémiques, se détériorent dans le monde entier.
- Les facteurs directs et indirects de changement se sont intensifiés au cours des cinquante dernières années.
- Les trajectoires actuelles ne permettent pas d’atteindre les objectifs de conservation et d’exploitation durable de la nature et de parvenir à la durabilité, et les objectifs pour 2030 et au-delà ne peuvent être réalisés que par des changements en profondeur sur les plans économique, social, politique et technologique.
- Il est possible de conserver, de restaurer et d’utiliser la nature de manière durable et, en même temps, d’atteindre d’autres objectifs sociétaux à l’échelle mondiale en déployant de toute urgence des efforts concertés qui entraînent des changements en profondeur.
Toute organisation qui le souhaite peut s’engager sur ce dernier point par une démarche visant à neutraliser ses impacts sur la biodiversité à travers un engagement fort, une approche intégrant pleinement ses parties prenantes à travers un dialogue et une gouvernance renforcée, un état des lieux solide visant à renforcer la planification et la maîtrise des impacts liés à ses activités, et des modalités de surveillance garantissant les résultats attendus selon un principe de redevabilité envers ces parties prenantes.